Enjeux et opportunités de la réforme du contentieux de la sécurité sociale sur l’optimisation des co
Depuis le 1er janvier 2019, le contentieux de la sécurité sociale a fait l’objet d’une refonte d’ampleur initiée par la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 dite de modernisation de la justice du XXIe siècle et complétée, plus récemment, par le décret n°2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale.
La traditionnelle dichotomie entre les Tribunaux du Contentieux de l’Incapacité (TCI) et des Tribunaux des Affaires de sécurité sociale (les anciens TASS), désormais obsolète, est remplacée par l’apparition d’un Pôle social intégré au sein des Tribunaux de Grande Instance, spécialement désignés à cet effet, en application des dispositions de l’article L.211-16 du Code de l’organisation judiciaire.
Cette simplification apparente dissimule, en réalité, un formalisme beaucoup plus strict que ce soit lors de l’introduction de l’instance ou de son déroulement.
Quoi qu’il en soit, l’intérêt attendu de la réforme en matière de risques professionnels est de concentrer, au sein d’une même instance, l’ensemble des problématiques résultant de la prise en charge, par la CPAM, d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.
Jusqu’à présent, l’employeur qui souhaitait contester l’octroi d’une rente notifiée à l’un de ses salariés devait saisir le Tribunal du Contentieux de l’Incapacité d’un recours portant sur la réduction, dans son quantum, du taux d’Incapacité permanente partielle (IPP) contesté sans pouvoir remettre en cause le caractère professionnel des lésions médicalement constatées ; la contestation portant sur le caractère professionnel de l’accident devant être initié, au préalable, devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale.
Mais ce n’est finalement qu’à réception du rapport d’évaluation des séquelles, transmis par le service médical au médecin conseil de l’employeur précédemment désigné à cet effet, qu’il apparaissait, bien souvent, que certaines lésions n’ayant pourtant aucun rapport avec le sinistre initial avaient pu avoir une influence, au moins indirecte, sur les séquelles constatées chez cet assuré, et, partant, sur le taux d’IPP.
L’employeur devait alors gérer deux recours parallèles devant deux juridictions différentes, sans possibilité de jonction.
La fin d’une dualité de juridictions sera-t-elle porteuse de nouvelles opportunités en termes de contestation pour l’employeur ?
Peut-on envisager qu’il soit désormais possible pour l’employeur de contester, au sein d’une seule et même audience à la fois le caractère professionnel de l’accident, ou de la maladie, et la rente consécutive à ce sinistre ?
Si l’on peut être tenté de répondre par l’affirmative compte tenu de la suppression des dispositions de l’article R.143-2 du Code de la sécurité sociale contraignant le Tribunal a surseoir à statuer dans l’attente d’une décision sur le caractère professionnel de la lésion, il faudra toutefois garder en mémoire que l’employeur demeure tenu de contester la décision de prise en charge, comme celle portant sur le taux d’IPP, dans un délai de deux mois.
Passé cette échéance, il n’est pas certain qu’il puisse se prévaloir de l’absence d’imputabilité de certaines séquelles, sans que la forclusion ne lui soit opposée.
Autre innovation majeure de la réforme, la disparition progressive de la Cour Nationale de l’Incapacité et de la Tarification de l’Assurance des Accidents du Travail (CNITAAT) au profit des Cours d’appel spécialement désignées.1
La Cour d’appel d’Amiens est promue, quant à elle, en charge du contentieux technique de la tarification avec la particularité qu’elle devra être saisie par voie d’assignation en justice à une audience préalablement indiquée par le premier président ou son délégué.
En bref, il est question ici des recours portant sur les décisions des Caisses d’assurance retraite et de santé au travail (CARSAT) ou des Caisses de mutualité sociale agricole (MSA) fixant les taux de cotisations AT/MP, accordant ou refusant d’accorder des ristournes, ou encore, déterminant des cotisations supplémentaires de l’employeur en raison notamment de la reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur.
A cet égard, il doit être souligné que si le nombre d’accidents du travail a baissé en France ces dernières années, on déplore, paradoxalement, une hausse des coûts pour les entreprises en raison de leur sinistralité.
Le Journal du Management Juridique n°69, Mars-Avril 2019, Spécial Droit Social
1 - Soit à l’exception des Cours d’appel d’Agen, Bourges, Chambéry, Douai, Limoges, Reims